Par Blandine CORDIER-PALASSE, Compliance – fraudes – investigations 2017, Décideurs collection guide annuaire p.63 – 02/2017

Entretien avec BLANDINE CORDIER-PALASSE ; présidente BCP executive search et vice-présidente, CERCLE DE LA COMPLIANCE

« Le directeur général doit participer à la promotion de la culture d’éthique et de compliance »

Blandine CORDIER-PALASSE

Ancienne directrice juridique et spécialiste des questions de compliance, Blandine Cordier-Palasse revient sur l’évolution de la fonction et son devenir en entreprise.

DÉCIDEURS. Pouvez-vous nous présenter le Cercle de la compliance ?

Blandine Cordier-Palasse. Créé en 2010, le Cercle de la compliance est une association. Elle réunit environ quatre-vingts adhérents – compliance officers, avocats, conseils… – à l’occasion de travaux, formations et conférences. Notre objectif initial était que les dirigeants et les organes de gouvernance d’entreprise prennent conscience des enjeux de la compliance. A l’époque il y avait peu de formalisation pour ces enjeux. Depuis, cela a évolué avec la loi Sapin 2. Elle impose le déploiement d’un programme de compliance ou l’Agence française anti-corruption (AFA). Cela confère un rôle plus important au compliance officer aux côtés de l’équipe dirigeante. L’association a aujourd’hui à cœur de participer à l’adoption de ces principes. L’objectif est de contribuer à la construction des compétences et des profils dont les entreprises ont besoin.

Pourquoi les entreprises devraient-elles accroître leurs efforts en matière de compliance ?

Sous la pression de la société civile et des régulateurs, des scandales, amendes et crises financières, les acteurs économiques et politiques deviennent de plus en plus « compliants » et éthiques. Ce n’est qu’un début. L’accroissement de l’exposition des entreprises aux législations internationales (UK Bribery Act, US FCPA) et nationales (Autorité de la concurrence, Cnil, AFA) ou encore la prise de plus en plus fréquente de sanctions fortes à l’encontre des entreprises, devraient les inciter à structurer davantage leur politique de compliance. Enfin, certains concurrents ou ONG n’hésitent pas à recourir au « name and shame ». Il attaqua la notoriété de l’entreprise pour dénoncer ses dysfonctionnements ou manquements, cela à des fins commerciales ou sociétales.

Plus que jamais donc, la compliance devient un élément stratégique pour les entreprises. Elle doit être intégrée à tous les niveaux de la stratégie – qu’elle soit corporate, business ou opérationnelle. Le but est que l’évolution et la transformation de l’organisation soient alignées avec les évolutions réglementaires. Autre élément important, la diffusion en interne de ces politiques, orientations et directives afin d’assurer un réel suivi des risques. C’est une question d’efficience. L’objectif d’une culture compliance, c’est la continuité du business et la pérennité de sa croissance.

Quelle est la place des compliance officers dans l’entreprise ?

Aujourd’hui, je dirais que la fonction a besoin de ce que les Américains appellent la « C-Suite presence » c’est-à-dire l’aptitude à être proche du comité exécutif, à parler au management. Son positionnement au sein de l’organigramme de l’entreprise est donc fondamental. Elle ne doit pas être une « sous sous-direction », mais au contraire être directement rattachée au directeur général, à la stratégie. Et ce, pour deux raisons. D’une part, le DG doit participer à la promotion de la culture d’éthique et de compliance au sein de l’entreprise. Il y va de son efficacité. D’autre part, inclure les sujets de compliance en amont de la stratégie et tout au long de son exécution s’assurer qu’elle protège l’entreprise dans son expansion plutôt qu’elle soit perçue en aval comme un frein, une contrainte au développement du business.

Quelles sont les qualités d’un bon compliance officer ?

Tout d’abord, il doit comprendre le business, ses enjeux, les marchés, les clients, les produits et les services, la culture et les risques fonctionnels, opérationnels, d’image et de réputation de l’entreprise. Positionné en tant que business partner, orienté solution avec un focus stratégie, il doit être un excellent communicant, pédagogue et fédérateur. On ne suit pas des process, on suit notamment un homme ou une femme. Enfin, je le constate dans les recrutements que j’effectue pour les groupes : il sait travailler en équipe pluridisciplinaire avec le juridique, la finance, l’audit, les risques, le business et piloter des équipes directes et indirectes. Idéalement, il a une vraie hauteur de vue et du courage. Des profils pointus avec de grandes qualités humaines : c’est ce que demandent désormais nos meilleurs clients.