Par Blandine CORDIER-PALASSE, Capital-Investissement, Collection Guide, Annuaire 2017 – 01/2017

Vous dites que jusqu’à présent, les fonds d’investissement n’avaient pas réellement besoin d’internaliser une direction juridique. Pourquoi cela devrait-il changer en 2017 ?

Avec l’avènement de la loi Sapin II, la complexification des règlementations internationales et la montée des obligations ESG, nous pensons qu’il devient pertinent de créer cette fonction en interne. Ceci dit, un fonds d’investissement n’est pas une entreprise du CAC40 ! Nous préconisons donc qu’ils créent un pôle, au périmètre plus général. Il couvre à la fois le juridique, la compliance, le risk management et les thématiques ESG. L’objectif est ainsi de le mutualiser sur l’ensemble des participations.

Il est donc temps pour les sociétés du capital -investissement de s’équiper en interne ?

Oui, pour les fonds occidentaux qui investissent dans les pays émergents, leurs propres LPs leur demandent, dans toutes les opérations. C’est une obligation de leurs règlements – de conduire un audit Compliance et ESG. Pendant la durée de l’investissement, il faut appliquer les règles de Compliance et d’ESG. Nous pensons qu’investir dans ce recrutement est rentable non seulement financièrement mais aussi, voire surtout, en termes de valeur ajoutée. Plus précisément, voici 3 raisons de créer un tel pôle :

1/ Un atout proactivité et rapidité en amont des deals
Avoir à ses côtés en permanence, un ou plusieurs experts business minded et centric, qui connaissent bien les problématiques, la culture et les participations du fonds, permettra aux sociétés de gestion d’avoir une grande vitesse d’action et de réaction, d’être dans l’anticipation, de préempter les sujets avec hauteur de vue, vision stratégique, recul et agilité afin d’avoir un coup d’avance sur les dossiers.

2/ Un tsunami réglementaire
Les sujets juridiques, compliance et ESG deviennent une affaire de tous les instants. Ils devront de plus en plus être intégrés à la stratégie et à la gestion quotidienne des fonds et de leurs participations. De même, les exigences de monitoring de risques et de reporting ne font que croître. Avoir des business partners experts « en résidence » sera un précieux atout.

3/ Un rôle de protection
Au-delà de ces contraintes de process, de chartes ou de reportings, c’est dans leur capacité à insuffler une culture de l’intégrité et de l’éthique des affaires à travers toute l’entreprise que ces experts participeront à la protection « stratégique » de l’entreprise – et donc contribueront à sa pérennité.

Cette vision est intéressante, mais n’est-elle pas à long terme ?

C’est vrai que pour l’instant, il y a peu de sociétés de capital-investissement françaises qui raisonnent ainsi. Or, il y en a : par exemple Ardian. Ce dernier fait partie des top 10 mondiaux, a de robustes équipes. On peut encore citer Idinvest, qui s’est étoffé en 2016 … En revanche aux US, les plus grands fonds américains ont bien compris leur intérêt. Apollo dès 2007 et depuis, Carlyle, KKR, Blackstone et Ares pour ne citer qu’eux, ont recruté un Chief Compliance officer de très bon niveau et souvent intégré au Board. Je suis convaincue que les meilleurs du capital-investissement français leur emboiteront le pas rapidement – performance et pérennité oblige.

Comment pouvez-vous aider les fonds et leurs participations face à ces évolutions que vous semblez croire inéluctable ?

La combinaison entre mon expérience dans un grand fonds d’investissement et mon expertise en recrutement international sur les
fonctions juridiques, compliance, risk et gouvernance me donne une compréhension fine des besoins des fonds et me permet donc de les
accompagner dans le calibrage de ce type de postes. Nous leur apportons notre connaissance du marché – qui ne cesse d’évoluer vers des profils beaucoup plus business centric et force de proposition. Du coup, mon équipe peut affiner les recherches et sélectionner les profils les plus en phase avec les attentes des managing partners – dans le dialogue et l’efficacité.

« Aux US, les Compliance Officers et les General Counsels des plus grands fonds sont membres du Board »

Blandine CORDIER-PALASSE