Par Blandine CORDIER-PALASSE et Catherine DELHAYE, Medef
Préférence française pour la conformité, l’éthique, la méthode douce et pédagogique. Face à la préférence américaine, voire anglo-saxonne pour la compliance, perçue comme plus systématique, obligatoire et imposée. Opposition entre compliance officers et directeurs de l’éthique ou directeurs juridiques. Bataille entre modernes et anciens, la distinction entre Compliance et Conformité suscite de nombreux débats. Mais cette distinction est-elle encore d’actualité ? Analyse de Blandine Cordier-Palasse, fondatrice du cabinet de recrutement BCP Executive Search. Autre analyse de Catherine Delhaye, Chief Ethics & Compliance Officer de Valeo.
- Regardons la loi Perben. Elle exige la mise en place de moyens de contrôle et d’exercice effectif de responsabilités par le biais de délégations.
- Penchons nous sur la récentes recommandations de l’Autorité de la Concurrence. Elle incite sans ambage à la mise en place de programme de conformité assorti d’un système d’alerte.
- Rappelons nous enfin la conformité règlementaire. Elle est organisée par les textes et imposée aux banques, aux laboratoires pharmaceutiques et autres activités hautement réglementées. Nous conviendrons rapidement que la compliance fait déjà partie de notre environnement juridique.
De plus, si nul n’est censé ignorer la loi, l’éthique des affaires et les bonnes intentions suffisent-elles à garantir le résultat ? L’objectif de conformité à la loi n’exige-t-il pas la mobilisation des ressources et moyens qui caractérisent les programmes de compliance :
- L’engagement déclaré, affirmé, martelé de la Direction de l’entreprise dans la lutte contre la corruption, le blanchiment d’argent, pour la libre concurrence, la sécurité des salariés ou usagers, en fonction des entreprises, des produits, des territoires.
- Des règles très claires en direction du personnel définissant précisément le positionnement de l’entreprise et les attentes de la direction face à tel ou tel risque.
- Des procédures en complément des règles pour que le personnel sache comment mettre en œuvre ces règles.
- Des outils, manuels, définitions, exemples pour aider à la compréhension des règles.
- De la formation et de la sensibilisation au risque concerné, à ses conséquences pour l’entreprise, aux règles, aux procédures. De sorte que l’ensemble du personnel comprenne les enjeux et le dispositif mis en place pour réduire les risques
- Des contrôles et audits pour s’assurer de la mise en œuvre effective des ces règles. Mais également, de leur assimilation et de leur appropriation par le management et les équipes.
Et surtout une détermination sans faille et de vrais moyens au service de programmes durablement encrés dans l’entreprise1.
Autant de mesures que finalement dictent le bon sens et le programme de ceux qui reconnaissent la complexité de la loi en général, la difficulté, voire l’impossibilité pour des équipes entières de maîtriser l’ensemble des lois d’un pays applicables à l’entreprise. A fortiori, lorsqu’il s’agit d’une multinationale opérant à l’étranger, qui plus est dans des pays dont les systèmes judiciaires ne sont pas stabilisés.
Alors pourquoi hésiter ? d’autant que le UK Bribery Act exige la mise en place d’un dispositif de compliance et que le Ministère américain de la Justice a émis le 14 novembre 2012 des recommandations. En confirmant spécifiquement l’importance qu’il attache à la qualité et à la réalité des programmes de compliance dans la détermination des poursuites et des sanctions en cas de corruption des fonctionnaires étrangers. Et qu’enfin, la France vient d’être épinglée pour son laxisme dans la lutte contre la corruption internationale, ce qui laisse augurer d’un activisme plus important des autorités françaises en la matière2.
Pourquoi s’interroger encore sur le bien-fondé d’une méthode qui ne garantit pas le risque zéro mais permettra de démontrer que l’entreprise est éthique dans son code et ses déclarations comme dans sa pratique : qu’en d’autres termes, la corruption, les pratiques anti concurrentielles, ne font pas partie de son mode opératoire mais le cas échéant sont le fait d’individus mal intentionnés comme il en existe partout ?
L’entreprise ne reflète rien d’autre que la société et comme la société, elle doit se discipliner. L’éthique constitue les fondations d’une conduite des affaires propre et durable. La compliance en est le bras armé. C’est un dispositif, duplicable à l’envie. Il permet d’engager toutes les forces vives de l’entreprise au service de sa performance et de sa pérennité.
(1) Lamy éditions, référence au livre sponsorisé par le Cercle
(2) Le Cercle organise en février 2013 une grande conférence rassemblant les différents professionnels de la lutte contre la corruption, magistrats, avocats, compliance officers, représentants de l’Etat, OCDE pour un débat sur les enjeux et contraintes de la lutte contre la corruption et un rapprochement des points de vue
Blandine Cordier-Palasse*·et Catherine Dehlaye** : Le Cercle De la Compliance
Le Cercle De la Compliance a pour objet de promouvoir, publier, conseiller, former et sensibiliser des acteurs. Il y a aussi des dirigeants du monde économique, politique et médiatique en matière de responsabilité sociétale (RSE) ou de compliance. En particulier, il y a ceux avec une approche transversale fonctionnelle / opérationnelle.
* Blandine Cordier-Palasse a été avocat puis directeur juridique et secrétaire du Conseil dans des groupes cotées pendant 20ans. Elle a créé ce cabinet spécialisé en recrutement juridique, compliance, administrateurs.
** Catherine Delhaye est Chief Ethics & Compliance Officer de Valeo. Elle a été Deputy General Counsel et Regulatory Ethics and Compliance Global Lead d’Accenture.
En savoir plus : https://www.lecercledelacompliance.com/
Connaître la Compliance : Origine et enjeux de la compliance