Par Blandine CORDIER-PALASSE, Revue RH&M n°58 p.42 – 07/2015

S’il est bien un domaine dont la réussite dépend de l’implication et de l’engagement des RH, c’est la compliance. La compliance s’entend d’un dispositif permettant aux entreprises, désireuses de se prémunir contre certains risques. Ces risques peuvent avoir un impact financier ou extra financier, d’image et de réputation. L’objet consiste à s’appuyer sur un ensemble de mesures pour y parvenir.

La lutte contre la corruption et les pratiques anti-concurrentielles, mais aussi la RSE, sont les domaines de prédilection de ce que l’on appelle communément aujourd’hui les programmes de compliance. Issus de la pratique des tribunaux américains et plus spécifiquement du département de la justice américaine et de la SEC. Les législateurs et régulateurs anglais, russe ou brésilien les préconisent. Ils y voient une vraie méthodologie permettant aux entreprises de s’organiser et de se protéger. L’Autorité de la concurrence française et tout dernièrement, le service central de prévention de la corruption y sont également favorables. Ils considèrent qu’une entreprise qui adopte un programme de compliance disposera d’une meilleure préparation. Elle sera mieux protégée et par la suite moins exposée à des sanctions de plus en plus lourdes et internationales.

Un programme de compliance s’entend généralement d’un ensemble de mesures indispensables, indissociables et complémentaires. La vocation est de prévenir certains actes par des politiques très claires, des règles et des interdits très précis. A cela s’ajoutent des programmes de sensibilisation et de formation à la fois au droit de la concurrence ou à des pratiques anti-trust. Il y a également des règles à ces règles et interdits, des opérations de contrôle interne, des audits et des plans d’action correctrices. L’idée générale est de développer dans l’entreprise une culture d’intégrité. Elle s’établit sur la base de règles claires d’une part, prônées par le top management et dûment relayées par le middle management et de leur déploiement scrupuleux d’autre part, sous la direction et la coordination d’un directeur de la Compliance.

Une telle mise en œuvre ne se fait pas en un jour : Elle implique une remise en cause des pratiques parfois très anciennes de l’entreprise, passe par l’implémentation de procédures, autorisations préalables, contrôles plus approfondis et parfois d’interdits. A titre d’exemple, la plupart des procédures anti-corruption prévoit les pots de vin sont interdits. Elles prévoient aussi l’interdiction de toutes les invitations ou relations susceptibles de donner l’impression que l’entreprise n’est pas hostile aux pots de vin. Les invitations à déjeuner se retrouvent parfois proscrites. La convivialité des relations clients s’en trouve affectée. Il va sans dire que l’arrivée de ce type de règles suscite peu d’enthousiasme et exige un travail d’éducation important et de change management.

…Elle ne se fait pas non plus du seul fait du Président, du directeur de la conformité ou de l’équipe de direction. Un travail en profondeur s’impose qui exige la mobilisation de toutes les équipes de management, quel que soit leur niveau. Le « role model » prend ici toute sa dimension en ce sens que le manager se devra non seulement de montrer son adhésion à la politique de compliance mais également s’en faire l’avocat, le porte-parole. Bien plus, il fera l’objet d’observations et de réactions quant à sa propre rigueur. Au contraire sa propre tolérance à la non compliance auront valeur d’exemple. Le rôle des RH sera donc primordial dans le succès du programme de Compliance :

– La conception du programme et en particulier du code d’éthique. Il se doit de refléter les valeurs de l’entreprise dans le fond et son mode d’interaction dans la forme.

– Son déploiement, en France ou dans de nombreux autres pays. Cela exige très souvent la consultation du CE, CHSCT et autres instances.

— Les formations à l’éthique et à la compliance doivent être systématiques. Elles sont aussi récurrentes, obligatoires, en particulier pour certaines catégories de collaborateurs. Ces derniers sont particulièrement exposés ou de niveau élevé dans le management.

– Les profils de poste doivent intégrer des obligations de compliance cohérentes avec l’activité de la personne considérée. Ils doivent aussi être cohérents avec son niveau d’exposition, le nombre et le type de collaborateurs encadrés…

– Des objectifs annuels collectifs et parfois individuels doivent être définis en matière d’éthique et de compliance.

Performance, compréhension des enjeux de compliance. C’est un rôle joué dans la diffusion du programme, respect des procédures jusqu’aux éventuelles sanctions des manquements doivent être suivis.

L’implémentation du programme éthique et compliance par la construction et la diffusion d’une culture d’intégrité et le change management qui l’accompagnent

…et plus généralement le lien entre ce programme et la culture de l’entreprise sont autant de sujets dans lesquels une collaboration sans faille entre la DRH et la direction de l’éthique et de la compliance s’impose. A défaut, un programme de compliance s’assimilera à une démarche Top/Down, probablement dogmatique et théorique. Il sera ainsi comme un carcan faute de parvenir à s’intégrer dans les opérations de l’entreprise.

Blandine Cordier-Palasse en collaboration avec Catherine Delhaye, co-fondatrices, Vice-Présidente et Secrétaire générale du Cercle de la Compliance.

Docteur en Droit, ESCP, Blandine Cordier-Palasse dirige un cabinet de recrutement, BCP Executive Search. Ses clients : Entreprises tous secteurs CAC40, SBF120, autres.

Pour en savoir plus : www.bcpsearch.com et www.lecercledelacompliance.com